Pauline Arnaud-Blanchard, directrice générale de h’up entrepreneurs

Créer son entreprise, c’est avoir l’audace de se lancer, encore plus lorsque l’on parle de créer une entreprise sociale, une association. Entretien avec Pauline Arnaud-Blanchard co-fondatrice de l’association h’up entrepreneurs, lancée en 2008 pour accompagner les personnes en situation de handicap dans l’aventure entrepreneuriale.

Fondation Entreprendre : Co-fonder une association relève avant tout d’une aventure entrepreneuriale. Quel a été le moteur de la création d’Hup ?

Pauline Arnaud-Blanchard : Les racines d’h’up s’appuient sur 3 piliers : le premier est lié à mon histoire personnelle, le second est fait de rencontres inspirantes et déterminantes, et la troisième repose sur la nécessité d’apporter des solutions aux défis de notre société.

Dès le plus jeune âge, j’ai été confrontée au handicap et aidante auprès de mon frère Antoine, autiste profond. La société n’étant pas forcément armée sur le sujet, ce qui m’a animé de colère pendant longtemps. Etudiante, j’ai la chance de rencontrer le Professeur Thierry Sibieude, fondateur de la Chaire Innovation et Entrepreneuriat Social de l’ESSEC. Il m’a inspirée et guidée sur la façon dont je pouvais transformer cette colère en innovation sociale. Avec un groupe d’étudiants, nous osons nous lancer dans une aventure inédite en proposant un projet d’entreprise sociale pour la pleine place des personnes handicapées dans l’économie. Contre toute attente, dans un cours de Business Plan classique, notre projet est retenu. Nous rencontrons alors plus d’une cinquantaine d’entrepreneurs en situation de handicap, notre projet prend forme. Parmi eux, Didier Roche, Franck Pruvost, Jérôme Adam et Jean-Luc Augaudy veulent aller plus loin avec moi dans le lancement du projet.
C’est grâce à cette aventure d’entrepreneuriat social et ces belles rencontres, que l’association h’up entrepreneurs a fait ses premiers pas il y a 16 ans.

Fondation Entreprendre : Depuis 16 ans, H’up s’attache à rendre visible les 80 000 chefs d’entreprise en situation de handicap et les 8 000 qui se lancent dans l’aventure chaque année. Quels ont été vos plus grands défis ?

Pauline Arnaud-Blanchard : L’un de nos beaux plus défis est d’avoir été à l’initiative de la reconnaissance législative des Travailleurs Indépendants Handicapés (TIH) dans la loi « Croissance, Activités, égalité des chances économiques » de 2015. Rétablir 80 000 entrepreneurs jusqu’alors oubliés de l’incitation financière des entreprises en faveur du Handicap, ce n’est pas rien !
Au-delà de cette fierté, cela représente un sésame pour chaque entrepreneur, celui d’être considéré. Cet enjeu a permis de changer le rapport avec les institutions et de gagner en légitimité.

Nous sommes aussi très heureux de pouvoir dire que 2024 est une année symbolique avec le 3 000^ème entrepreneur en situation de handicap accompagné par h’up. Un magnifique travail d’équipe !

Et puis, je ne peux pas oublier les Trophées h’up créés en 2018, grâce au coup d’audace de notre Président de l’époque Didier Roche, une très belle initiative qui met en lumière, sur scène, tous ces entrepreneurs porteurs d’innovation. Cet événement a pour ambition d’être aussi représentatif des 80 000 chefs d’entreprises porteurs de handicap en France et des 8 000 créateurs annuels.
Rendez-vous cette année le 3 décembre au soir pour la 7^ème édition !

Fondation Entreprendre : Quels messages souhaitez-vous adresser aux entrepreneurs, dirigeants associatifs, mécènes et partenaires qui nous lisent ?  

Pauline Arnaud-Blanchard : Je crois profondément en la puissance du lien qui nous unit et en celui de la fraternité. La fraternité est source de sagesse, elle participe à l’expérience de vie, elle est la clé de la relation à l’autre.  J’aimerais que nous puissions entreprendre et construire plus fortement ce lien de fraternité avec les personnes porteuses de handicap. C’est cela faire société. J’aime comparer le handicap à une forme harmonieuse de tectonique des plaques. Elles se rencontrent, se comprennent, se confrontent et s’imbriquent en s’ajustant l’une à l’autre pour faire système.

Osons dépasser les difficultés, entreprenons la solution de la fraternité, créons ensemble l’environnement et l’espace pour faire advenir une société encore plus inclusive et durable.